Publié le 16 mai 2024

Portraits inspirants

Patrick Gelet, horloger campaniste : un métier-passion

Patrick Gelet est horloger campaniste. Nous avons eu la chance de monter avec lui dans le clocher de l'église de Tramayes à la découverte de ce patrimoine caché de nos villages. Une rencontre hors du temps.

Patrick Gelet est horloger campaniste. Nous avons eu la chance de monter avec lui dans le clocher de l’église de Tramayes à la découverte de ce patrimoine caché de nos villages. Une rencontre hors du temps.

Un métier peu connu

Depuis quelques temps, la grosse cloche de l’église de Tramayes ne sonnait plus comme d’habitude. Un son mat et étouffé lors de la volée (balancement des cloches). La mairie a donc fait appel à un expert bien particulier : Patrick Gelet, horloger campaniste de son métier. «C’est tout ce qui touche à l’horlogerie d’édifice » explique-t-il. Campanae veut dire « cloches » en latin. Autrement dit, Patrick s’occupe de l’affichage public de l’heure et la sonnerie des cloches, rythmant la vie des villages. Il travaille dans des gares, des mairies, des écoles mais surtout, à 80% dans le clocher des églises.

Petit, Patrick s’amusait déjà à démonter les réveils et horloges. Son grand-père s’occupait de l’horloge du village. Mais ce n’est qu’en 1986, après plusieurs années à dépanner des pompes de station-services qu’il décide de devenir horloger et se forme à Chollet, dans le Maine-et-Loire.

Un savoir-faire ancestral…

Patrick est un horloger campaniste traditionnel. C’est à dire qu’il travaille dans l’optique de réparer et maintenir l’existant. Contrairement à la plupart des compagnies d’horlogerie qui aujourd’hui préfèrent remplacer et remettre à neuf des pièces pourtant réparables. Beaucoup de cloches anciennes, datant parfois des XVème ou XVIème siècles, sont classées aux monuments historiques au titre d’objets mobiliers et leur intérêt ainsi reconnu au regard de l’Histoire, de l’art, de la science ou de la technique.

Patrick se fait donc le gardien d’un patrimoine séculaire et répare plus qu’il ne remplace. Les pièces périphériques de la cloche, si elles sont d’origine, revêtent pour lui autant d’importance que la cloche elle-même. Le joug (ossature en bois tenant la cloche), les brides de suspension en bronze, le battant (pièce qui vient frapper l’intérieur de la cloche lors de la mise en volée permettant de la faire sonner). Tant que ces pièces sont fonctionnelles, elles sont gardées et entretenues. Leur pérennité est assurée par des contrats de maintenance annuelle signés avec les mairies, permettant d’éviter une grande partie des interventions curatives.

…mais en danger

Concernant la cloche de Tramayes, Patrick n’a donc changé aucune pièce. Il s’est contenté de resserrer le roulement à bille et les ferrures des jougs, graissé les chaînes… Rendant à la cloche sa jeunesse sans avoir besoin de remplacer des pièces qui n’en avaient pas besoin.

Cependant, économie et préservation de l’existant sont des valeurs qui se perdent petit à petit. Selon Patrick, son métier est en grand danger. Beaucoup des campanistes traditionnels partent à la retraite mais aucun jeune ne semble prêt à reprendre le flambeau. D’une centaine d’artisans en France dans les années 1920, il en reste moins de 20 aujourd’hui. Avec l’électrification progressive au vingtième siècle, le métier s’est modernisé. Les moteurs électriques, ne dosant pas leur force sont très dégradants pour le matériel. Ce qui incite les compagnies à moderniser d’autant plus les mécanismes, amenant à la disparition du patrimoine et l’uniformisation. L’âme de chaque clocher, jadis unique, tend à disparaître. A moins qu’un tramayard (mot désignant les étudiants de l’Institut) ou autre, épris d’artisanat, cherchant une reconversion passionannte, ne vienne prendre la suite ?

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